mardi 7 mai 2013

J'habite maintenant dans l'bois.

Jadis, j’étais une fille de ville. Comment dire, l’énergie que celle-ci me procurait était croissante, tel une sorte d’effervescence qui ne cessait à l’aller et  venue de ma personne dans les rues  de la ville. Vous savez, ce genre de symbiose avec le café à 2,75$ que tu prends le temps de siroter tel une boisson sainte à deux pas de ta sonnette d’appart. La ville sous tous ses klaxons, avec ces gens  bizarres qu’on croise souvent mais à qui on ne parle jamais. On aime bien s’imaginer, qu’il est le cassier de la caisse pop, ou le préposé aux pointes de pizza d’à côté.

Puis on avance dans la vingtaine et on se rend compte, qu’au fond, on redevient nostalgique de notre enfance, où on attendait que les petits oiseaux au levé et peut-être, pour compléter l’ambiance,  avec une odeur de gazon tondu d’la veille au nez. On s’rend compte, qu’au fond, c’était peut-être et probablement, juste un trip, la ville. Bon, ok, un trip qui a duré une douzaine d’années, mais quand même un trip.

On entend souvent parler de la crise de la quarantaine, certes. Mais la crise de la trentaine, elle, en avez-vous déjà entendu parler? Elle se manifeste chez certaine personne, parfois à la fin vingtaine (jusqu’à la mi trentaine, imaginez). Bon, j’ignore s’il s’agit de cas scientifiques prouvés en labo, mais je l’ai personnellement observé dans mon entourage : besoin de changement, élan de confiance, but qui est tout à coup très clair et moyens concrets que tu prendras pour obtenir tout ce dont tu rêves depuis toujours…Ou depuis quelques matins!..

Après le trip de ville, de bars, de soirées arrosées que tu ne saurais énumérer, tout est maintenant clair. La direction sera,  à partir de maintenant, tout autre. Fini le transport en commun, la tournée des grands ducs, les «cover charges», les oreilles qui bourdonnent à côté des caisses de son, les rencontres par rapport et les jasettes nocturnes dans un resto ouvert 24h à 4h du matin. Attention, je ne méprise pas ceux et celles qui ont ce style de vie, puisque j’ai adoré ce dernier, à certaines époques, plus que tout autre style de vie.

J’opte asteure pour le chant du coq plutôt que la sirène de police au réveil. Ok, certains gens doutent de mon choix qui est celui de vivre dans l’bois et prétendent que je me lacerai rapidement de ce style de vie : ils ne comprennent quedal…Aie, (!!) j’ai tu l’droit d’vieillir un peu moi aussi!

Oui, j’préfère asteure les cafés bio où ça sent les épices, avec des toiles fuckées au mur, où ils servent d’la bière québécoise à cinq piastres la pinte, plutôt que les lounges ultra branchés électro où les variétés de cosmopolitains se résument à des noms de villes américaines et qu’ après 3 gorgées, ça t’a coûté vingt piastres (incluant le cover charge et l’extra olive à 2$), et ce, tout en humant les odeurs de parfum à la mode des gens de la place qui se croient à la mode. Bon, ok, c’est peut-être moi qui es out, mais je préfère sauter ce détail urbain.

J’suis pas rendu une «grano» finie pour autant : j’me nourris encore avec des produits animaliers, j’bois encore de la liqueur en mangeant du pop-corn et il m’arrive aussi de manger du pain blanc. En plus, j’suis plus obligé de courir les jardins communautaires pour me faire pousser des tomates! Et que dire du fait que j’remplace l’odeur des égouts par celle des nombreux épinettes.

Bon, ok, les camions à vidanges passent pas souvent dans l’coin, mais c’pas grave, on a trois grosses poubelles au lieu d’une. J’m’ennuyais des vraies friperies, où tu vas payer trois piastres pour un jeans à peine usé, pas vingt-cinq!! (surtout dans une boutique qui ''s’alimente'' au Village des Valeurs)!  Et non, j’suis pas le genre de fille qui a juste des pulls de laine dans son garde-robe.  J’en ai à peine deux. Ou trois.  Je n’ai pas quitté la ville pour la banlieue, ni la campagne. Je l’ai quitté pour vivre dans l’bois et je l’assume! Là où il n’y a que vous et  que la plupart de vos lointains voisins sont présent s une dizaine de fois par année, à leur chalet.  Là où l’eau du robinet  ne goûte pas l’eau d’la piscine.  Vous me direz que tous les gens du village à part celui du dernier rang savent que j’viens d’Québec, pi que j’en avais marre de la ville, et que c’est pour ça qu’suis rendue ici? Ouin, mais eux autres, au moins, ils n’arrêtent pas de me répéter : « tu vas voir, tu vas aimer ça icitte! »

Le pire dans toute cette histoire de coin perdu, c’est que ces  joviaux habitants ne me connaissent même pas,  mais ils ont tellement raison!...
*Ci-haut à gauche, une photo que j'ai prise de notre Bernache sauvage apprivoisée, la ''mascotte'' de la place, affectueusement appelée Saturnin. Elle a fait du domaine sa demeure permanente, et même lorsqu'une volée de bernaches se posent sur le lac, elle se joint à eux une quinzaine de minutes et revient en ses lieux après avoir passé un peu de temps avec les siens sur l'eau. Ses meilleurs amis sur la fermette sont la petite chèvre blanche et le ''terrible'' mouflon (on l'appelle non affectueusement - Ze Bouc!).